Il y a quelque chose de pourri au royaume des sites d’information

Redaction

La mesure d’audiences est un sujet inépuisable de polémique. NetRatings, le panel mis en place sur la France par Nielsen et Médiamétrie, vient de révéler les chiffres de décembre des sites internet. Les évolutions des uns et des autres sont déjà remises en question.

C’est peu de dire que la révélation du classement des sites d’ »information » a suscité la polémique (nous avons publié les chiffres « Brand », qui ont pour principale caractéristique de mesurer toutes les adresses de type monsite.fr/). Car l’enquête menée par Nielsen et Médiamétrie sur le mois de décembre ressemble plus à une mauvaise farce qu’à un instrument fiable, capable d’épauler les agences médias et les annonceurs dans leur travail. Cependant, l’instrument de mesure ne semble pas être en cause. Les anomalies sont à chercher du côté des sites mesurés.
Pour être tout à fait clair, ce Top 10 des sites classés dans le NetRatings de décembre a plus à voir avec une étape du Tour de France qu’autre chose, pour ce qui est de la part d’ombre qu’il recèle. Comme nous l’avons déjà expliqué (lire ici, et) , l’évolution d’une audience sur Internet est susceptible d’être manipulée par un certain nombre d’actions, toutes licites, mais qui entrainent un défaut de concurrence plus ou moins patent. Ainsi, s’il est possible d’acheter de l’audience, comme l’on accroît artificiellement les performances d’un sportif, l’idéal serait que toutes les pratiques soient rendues publiques en même temps que le classement. Chaque site devrait ainsi documenter l’étude avec le nombre de mots clefs achetés, les opérations de loterie, ou encore les opérations de marketing croisées.

Marco Pantani du Web

Ainsi, l’on comprendrait peut-être mieux pourquoi lefigaro.fr, ou NRJ.fr (version « Channel »), sans qu’il n’y ait de changement substantiel de leur périmètre, affiche une croissance aussi impressionnante d’un mois sur l’autre, quand tous les concurrents sont à la peine. Il y a du Marco Pantani dans cette montée du col de fin d’année … Et pour cause, aujourd’hui, il est rentable pour un site learder d’acheter de l’audience ! Au bas mot, un million de visiteurs uniques coûtent entre 20 000 et 30 000 euros. Une dépense facilement rentabilisée en recettes publicitaires, pourvu que vos équipes sachent un peu conserver l’internaute sur les pages de votre site.
Il n’y a aujourd’hui aucun gendarme capable de surveiller les pratiques sur le Net. Nielsen possède bien un organe dit d’ »auto-régulation » – créé en octobre 2006, il est composé de 14 membres, appartenant tous au comité Internet de Médiamétrie : Carat, DDB, Les Echos, France Télécom, France Télévisions, le Geste, l’IAB, Publicis, Media Contacts (Groupe MPG), MSN, le SRI, l’UDA, Skyrock, TF1 – , il , mais il n’a pas été très actif ces derniers temps. Il se pourrait toutefois qu’il soit réactivé prochainement pour taper du poing sur la table.
La supercherie est d’autant plus visible qu’aucun autre indicateur de mesure des audiences sur le Net n’a repéré une montée en puissance des audiences au mois de décembre. Bien au contraire, Alexa ou Google Trends, qui valent ce qu’ils valent, affichent des audiences en baisses pour les sites lemonde, lefigaro, ou liberation. Tout le monde serait à la même enseigne. Il faut croire, donc, que certains de ces sites ont développé des capacités particulières pour sur-performer sur une seule mesure : le Nielsen NetRatings. Un choix marketing qui se comprend bien, puisque cet instrument s’est imposé comme la référence pour la publicité.
Une plus grande transparence, voilà qui aurait pu être un axe de réforme important pour la pluralité des sites d’information sur Internet, lors des récents Etats Généraux de la presse.

Source: Électron libre